Justice pour Gaza : qui fait quoi ? – Une infographie de Justice Info

Justice Info, média de la Fondation Hirondelle et site d’information indépendant couvrant l’actualité des initiatives de justice dans les pays confrontés à des violences, a publié début novembre une infographie permettant de faire le point sur l’ensemble des initiatives de justice entreprises depuis le début de l’offensive lancée par le gouvernement Israélien à Gaza après le 7 octobre 2023. Thierry Cruvellier, rédacteur en chef de Justice Info, revient sur l’intérêt d’une telle carte.

Pourquoi avoir choisi de réaliser cette infographie ?

Thierry Cruvellier : Dans une situation où l’on a de multiples initiatives de justice qui sont activées, une infographie permet de faire le point sur la situation de manière relativement exhaustive et plus pédagogique. C’est aussi un outil de clarification du paysage judiciaire ou parajudiciaire qui est multiforme, dont les éléments travaillent à la fois de manière autonome et inévitablement interagissent. Cette synthèse de l’information est utile et plus facilement lisible pour nos lecteurs. L’analyse et les opinions laissent la place à la clarté simple et pratique d’une carte de la justice qui permet de répondre de manière synthétique à la question « Qui fait quoi ? ». C’est aussi un exercice utile et pratique pour la rédaction. Par exemple, ça nous oblige à essayer de rassembler toute l’information sur les initiatives nationales à l’encontre des soldats israéliens qui auraient pu se rendre coupables de crimes de guerre.

L’analyse et les opinions laissent la place à la clarté simple et pratique d’une carte de la justice qui permet de répondre de manière synthétique à la question « Qui fait quoi ? »

Il faut toujours vérifier la réalité de chacune de ces plaintes et sa situation juridique : est-ce qu’elle a été jugée admissible par l’appareil judiciaire national ou est-ce qu’elle est restée au niveau de la plainte et donc à ce stade relève peut-être plus de l’activisme politique que de l’action judiciaire ? C’est assez difficile d’être complet en la matière parce qu’il y a des plaintes qui apparaissent dans de nombreux pays sans qu’on ne le sache nécessairement. Donc pour le moment il s’agit d’une image prise à un instant T et que nous pourrons approfondir ou détailler par la suite.

En quoi ce travail de visualisation aide-t-il à mieux comprendre la complexité de la justice internationale et son impact dans cette situation ? 

Thierry Cruvellier : Déjà, par nature, l’effet attendu d’une visualisation, c’est de voir sur une seule carte la multiplicité des mécanismes de justice qui sont mis en œuvre sur une situation ou un crime donné. Et donc de commencer à mesurer en un coup d’œil où ils se situent géographiquement et comment, éventuellement, ils se superposent ou interagissent.

Si on regarde cette carte de la justice sur Gaza, on observe tout de suite que pour l’instant, les actions les plus concrètes et réelles en matière de compétences universelles et de poursuites contre des soldats israéliens constituent un phénomène massivement ouest européen même s’il s’y ajoute au moins le Canada et le Brésil.

Cela permet de voir de manière assez éclatante comment les bouleversements géopolitiques influent directement sur le champ des possibles en matière de justice.

Autre exemple, la plainte contre Israël devant la Cour internationale de justice sur laquelle l’Afrique du Sud est le pays leader : elle a été souvent décrite comme une initiative du sud global comme on dit. Et là, on voit sur la carte que c’est assez vrai, mais pas tout à fait, puisqu’on y trouve aussi l’Espagne et l’Irlande. Donc à travers ces deux exemples, on peut développer ultérieurement toutes sortes d’analyses géopolitiques et voir aussi leur évolution dans le temps. Si nous ré-éditons cette carte dans six mois ou un an à quoi ressemblera-t-elle ? Nous pourrons alors la comparer à celle que nous publions aujourd’hui. Nous allons faire le même exercice sur la Syrie et je pense qu’il va en sortir une vision extrêmement nouvelle que nous pourrons comparer à la carte que nous avions publiée sur ce même sujet en 2019.  Là, cela permet de voir de manière assez éclatante comment les bouleversements géopolitiques influent directement sur le champ des possibles en matière de justice.